Amnesty International s’inquiète des politiques natalistes en Iran
Restrictions aux méthodes de contraception, freins à l’embauche des femmes refusant d’avoir des enfants… Deux textes étudiés au Parlement risquent de transformer les Iraniennes «en machines à bébés», selon l’ONG.
Nous ne devrions pas être «un pays de 75 millions, nous avons la capacité de devenir au moins 150 millions d’habitants, si ce n’est plus», déclarait l’année dernière aux Iraniens l’ayatollah Ali Khamenei, la plus haute autorité religieuse du pays. Craignant un vieillissement de la population, le Guide Suprême encourage, depuis plusieurs mois, les couples mariés à avoir davantage d’enfants.
Les désirs du guide sont des ordres pour les autorités politiques. Elles ont d’abord diminué le budget consacré au planning familial dans les centres de santé et supprimé les subventions pour les vasectomie, deuxième moyen de contraception le plus utilisé dans le pays. Aujourd’hui, le Parlement a décidé d’examiner deux projets de loi en faveur d’une politique nataliste, provoquant l’inquiétude d’Amnesty International, qui craint de voir les Iraniennes transformées en «machines à bébés».
Le premier texte interdit la stérilisation volontaire – sous peine de punition pour les patients et pour le médecin – et vise à limiter l’accès à la contraception en bloquant toute campagne d’information. En privant les femmes, notamment les moins instruites, de précisions sur les possibilités de contraception, le gouvernement risque de faire exploser le nombre de grossesses non désirées, redoute Amnesty International. L’avortement étant illégal, de nombreux couples risqueraient alors de se tourner vers des méthodes d’interruption de grossesse clandestines et hasardeuses. De même, craint Amnesty, les restrictions apportées aux méthodes de contraception les plus simples, comme le préservatif, autrefois distribué gratuitement dans les centres de santé urbains, pourraient engendrer une hausse des maladies sexuellement transmissibles.
Les procédures de divorce rendues encore plus compliquées
Le deuxième projet de loi, qui doit être débattu en avril, prévoit de limiter l’accès au travail aux femmes qui refuseraient mariage et maternité. Pour cela, il invite toutes les sociétés publiques et privées à accorder la priorité aux hommes ayant des enfants, aux hommes mariés sans enfants, puis, aux femmes mariées et ayant des enfants. Les célibataires sont donc mis sur la touche. Le texte prévoit également de compliquer les procédures de divorce et de limiter les interventions de la police dans les conflits conjugaux, ce qui risque d’encourager les violences domestiques, selon l’ONG.
«Ces projets de loi vont enraciner des pratiques discriminatoires et faire régresser de plusieurs décennies les droits des femmes et des filles en Iran, regrette Hassiba Hadj Sahraoui, directrice adjointe du programme Afrique du Nord-Moyen Orient d’Amnesty International. Les autorités encouragent une culture dangereuse, qui prive de droits essentiels les femmes qui ne sont plus considérées omme des êtres humains qui jouissent de droits fondamentaux leur permettant de faire des choix pour leur corps et leur vie».