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Chine : Sur les travailleuses du sexe

L’industrie du sexe en Chine a connu une croissance rapide au cours des deux dernières décennies et il y a aujourd’hui entre quatre et six millions de travailleuses du sexe dans le pays. Cependant, elles sont trop souvent stigmatisées par la société comme immorales et malades. Elles sont maltraitées par les clients de même que par les policiers et sont passibles d’amendes et de détentions arbitraires pouvant aller jusqu’à deux ans.

Un nouveau rapport de Human Rights Watch (HRW), publié aujourd’hui, demande au gouvernement chinois de réagir à ces violences en décriminalisant la prostitution volontaire des adultes et en soutenant le développement d’organisations de soutien aux travailleuses du sexe à travers le pays.

« En Chine, la police agit souvent comme si, en s’engageant dans le travail du sexe, les femmes avaient perdu leurs droits », déclare Sophie Richardson, directrice de HRW Chine. « Le gouvernement doit renoncer à ses lois répressives contre les travailleuses du sexe, stopper les violences policières et mettre fin à la répression contre les défenseurs des droits des prostituées ».

Le rapport de HRW, basé sur 140 entretiens avec des travailleuses du sexe, clients, policiers, fonctionnaires de la santé publique et travailleurs d’ONG, principalement à Beijing, a montré que la préoccupation majeure des prostituées était la violence des clients et l’inefficacité de la police. En effet, en décembre de l’année dernière, une coalition d’organisations de travailleuses du sexe a publié une pétition, sans précédent, dénonçant l’échec de la police dans la protection de prostituées victimes de crimes. Il y a maintenant plusieurs organisations non-gouvernementales (ONG) en Chine qui aident les travailleuses du sexe, mais leurs activités sont étroitement contrôlées et limitées par les autorités. Ces groupes, issus de la société civile, rendent un service vital et HRW souligne qu’ils doivent être autorisés à se développer et à s’épanouir.

Les descentes de police périodiques sont une autre préoccupation majeure pour les prostituées. Au cours de raids sur les salons de coiffure, salons de massage et autres lieux de travail, les prostituées sont souvent battues, arrêtées et condamnées à des amendes. Les participants à une table ronde sur le travail du sexe en Chine, organisé par HRW à Hong Kong le 13 mai, ont souligné que les amendes sont aujourd’hui de loin la peine la plus courante utilisée par les policiers locaux car cela leur permet d’augmenter leurs revenus. Ces amendes obligent parfois les travailleuses du sexe à emprunter de l’argent aux propriétaires de bordel qui, à leur tour, les obligent à travailler pour eux.

Selon le rapport, les politiques publiques actuelles violent également les droits des travailleuses du sexe à la santé et à la vie privée. Les prostituées interrogées par Human Rights Watch ont décrit comment elles ont été soumises à des dépistages forcés du VIH et comment les résultats de ces tests ont été régulièrement communiqués à des tiers. L’attitude des responsables de la santé décourage de nombreuses travailleuses du sexe de se faire tester ou de se faire soigner, surtout si ils agissent en collaboration avec la police locale.

Sophie Richardson a souligné: « Les exactions commises par les services répressifs découragent les travailleuses du sexe de demander l’aide de la police lorsqu’elles sont victimes d’actes criminels, ou l’aide des services de santé publique quand elles sont dans le besoin. Cela les rend plus vulnérables aux abus et à l’exploitation. Si la Chine est sérieuse dans la promotion des droits des femmes, elle ne peut pas ignorer les millions de femmes qui se livrent au commerce du sexe ».

SOURCE : China Labour Bulletin, 14 mai 2013 (traduit pare nos soins)

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