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Réforme des retraites : les femmes gagnantes, vraiment ?
Categories: Monde : France, Travail

La question de l’égalité hommes-femmes est au cœur de la nouvelle réforme des retraites, assure le gouvernement en communiquant allègrement. La pension des femmes à la retraite est aujourd’hui presque moitié moindre que celle des hommes. Des mesures sont prévues pour mieux prendre en compte les temps partiels et les congés maternité. Mais cela suffira-t-il à combler cette profonde inégalité ? Demain, une femme à la retraite vaudra-t-elle plus que la moitié d’un homme ?

« Pour la première fois », une réforme des retraites « met la question de l’égalité femmes-hommes au cœur de ses objectifs », s’est réjouie la ministre des Droits des femmes, Najat Vallaud-Belkacem, le 28 août dernier, au lendemain de la présentation de la réforme par le Premier ministre Jean-Marc Ayrault. Il était temps. « Le montant moyen de la pension – tous régimes confondus – s’élève fin 2008 à 833 euros par mois pour les femmes, contre 1 743 euros par mois pour les hommes. Ainsi la pension de droit propre des femmes ne représente en moyenne que 48 % de celle des hommes », rappelle l’Insee. Traduction : une femme à la retraite ne vaut que la moitié d’un homme. Et la dernière réforme des retraites, il y a quatre ans, n’a rien arrangé.

Première avancée vantée par la ministre socialiste, également porte-parole du gouvernement : le renforcement des droits à la retraite « pour les 3,5 millions de femmes qui travaillent à temps partiel, grâce à l’abaissement du seuil de validation des trimestres ». De quoi s’agit-il ? Pour valider un trimestre d’activité, un salarié à temps partiel (80% sont des femmes) devait auparavant totaliser au moins 200 heures payées au Smic sur le trimestre en question. Soit 15 heures par semaine. Avec la réforme, on passe à 11h par semaine (150 h sur un trimestre).

Un pas vers les salariés très précaires

« En abaissant le nombre d’heures à partir duquel on peut valider des trimestres, le gouvernement fait un pas vers les petits temps partiels, reconnaît Christiane Marty, membre d’Attac, de la fondation Copernic (think-tank de la gauche anticapitaliste) et syndicaliste de Sud Energie. Mais cela concerne très peu de monde. » Environ 3% de salariés très précarisés. Aux yeux de la CGT, cette « proposition gouvernementale paraît équitable ». Mais la confédération craint qu’elle ne devienne « un encouragement à développer encore plus la précarité, en particulier les contrats courts, et les contrats discontinus (par exemple, 4 h par semaine un mois, 20 h le suivant). »

Autre mesure « décisive » de la réforme Ayrault : une meilleure prise en compte des congés maternité dans le calcul de la retraite. Là encore, l’optimisme de la ministre des Droits des femmes est à tempérer. Cette prise en compte ne concerne que les carrières longues, c’est-à-dire les femmes qui ont commencé à travailler jeunes, qui ont une carrière complète, et peuvent donc prétendre à un départ en retraite à 60 ans. Précisons que le dispositif « carrière longue » n’a concerné que 625 000 personnes entre 2004 et 2010, dont seulement 20% de femmes, sur les 6 à 7 millions de personnes qui ont fait valoir leur départ à la retraite. « On ne peut pas dire que les effets de ce choix seront nuls. Mais enfin, encore une fois, cela reste à la marge », soupire Christiane Marty.

Des avancées jugées marginales

Ce point sur la maternité ne fait que corriger une disposition injuste du décret de juillet 2012 sur les carrières longues. Promise par le candidat Hollande, la possibilité de partir à 60 ans a été ré-instaurée pour les personnes ayant commencé à travailler tôt. Avec un bémol : le fait de ne pouvoir comptabiliser la totalité des périodes dites « assimilées », c’est-à-dire non travaillées (chômage et congés maternité). « Impossible de prendre en compte plus de six trimestres au total pour les périodes de maladie, maternité et accident de travail », détaille Christiane Marty. La suppression de cette injustice était donc bien le moins. Mais le gouvernement s’est abstenu de communiquer sur ce détail.

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