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Roumanie : ouvrières chinoises
Categories: Monde : Asie, Travail

Ouvrières chinoises Bacau Roumanie

La Roumanie: le berceau de la confection de l’Ouest en péril

La Roumanie, pays peuplé de 21 millions d’habitants, détient une place stratégique au centre de l’Europe de l’Est. Suite à la levée des restrictions ce 1er Janvier 2014 concernant la migration de travailleurs roumains et bulgares vers l’Europe de l’Ouest, la Roumanie se trouve au coeur de tous les débats: Roms, accords avec la Russie pour un vote favorable au siège de l’OTAN et corps médical roumain envahissant les hôpitaux français, autant dire que les discussions vont bon train. Pourtant, nous devons à la Roumanie un certain pourcentage de nos garde-robes, puisque la Roumanie est la Chine de l’Occident en terme de production textile. Retour sur une industrie dont l’Ouest ne saurait se passer.

Made in Romania

Zara, Steilmann, Hugo Boss, Pierre Cardin, Benetton, Fashionable… Que de grands noms, et qui contre toutes attentes, ne sont sont ni “made in Bangladesh” ni “made in China”, mais bien “made in Europe”, et plus précisément, “made in Romania”.  Si les pays asiatiques détiennent le plus grand nombre d’usines textiles et d’ateliers de confection, ces grandes marques de renommée mondiale ont elles choisi de rester en Europe. Et pour cause: l’Asie est certes compétitive en terme de coûts de production, mais la Roumanie jouit de deux atouts comparatifs bien plus puissants sur le marché européen: le salaire roumain minimum s’élevant à 157 euros et la Roumanie étant capable de produire et livrer la marchandise en moins d’une semaine, les économies d’un point de vue logistique et salarial sont considérables. C’est pour cela que la Roumanie a adopté, suite à la transition vers l’économie de marché mise en place en 1989, un système de production très en vogue dans l’industrie textile, à savoir le “Lohn production”. Ce système consiste en un contrat de production entre une grande entreprise et une manufacture, l’entreprise fournissant les matières premières et passant commande pour un nombre précis de pièces, que la manufacture retourne en produit fini. C’est donc grâce à ce système que la Roumanie a jusqu’en 2007-2008 été un de plus importants producteurs européens.

Un manque de main d’œuvre

Cependant, depuis sont entrée dans l’Union européene en 2007, les choses ont quelque peu changé. Le coût de la vie a augmenté, et le secteur du textile ne paye plus assez. D’autre part, la migration de 2 millions de roumains vers l’Ouest (soit 10% de la population) n’est pas non plus étrangère au phénomène. Il y a de ce fait un grand nombre de postes vacants dans l’industrie du textile roumaine, qui s’élève à 35.000 emplois à pourvoir, ce qui a forcé le pays à recruter chez la concurrence, à savoir la Chine. La ville de Bacău a par exemple accueilli 10.000 ouvrières chinoises afin de renflouer les ateliers de Sonoma S.A., car ces dernières n’ont pas de grandes prétentions salariales, le salaire chinois moyen dans la confection étant de $15 par mois. De même, Wear Company, fabrique également basée à Bacău et fournisseur de Benetton et Prada, emploie déja 300 coûturières chinoises. Pour rester compétitives, d’autres entreprises ont opté pour une autre solution: les robots. L’entreprise Textila Oltul a elle choisi d’investir dans des robots industriels afin de palier au manque de main d’oeuvre, et ainsi éviter de perdre ses contrats à l’export.

La situation est donc dérangeante, surtout dans un pays aussi friand de mode et de grandes marques: le marché de l’habillement, de la chaussure et de l’accessoire s’élevant actuellement à 2.5 milliards d’euros, c’est un marché qui ne peut être laissé de côté.

 Cependant, aussi favorable que soit la Roumanie à la confection et la production de produits textiles, sans main d’œuvre, le pays se retrouve néanmoins dans une impasse et devra pour garder ses contrats avec l’Ouest miser sur l’innovation, qui pourrait prendre la forme de nouveaux équipements industriels plus sophistiqués.

Anais P.

SOURCE : www.exaplace.com

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