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En Suisse…

Quels enjeux pour les électeurs LGBT vaudois?

Le 30 avril, le canton se rend aux urnes pour élire son parlement et son gouvernement. Tour d’horizon des dossiers qui intéressent nos communautés.

A l’image du bon vieux compromis vaudois, dans ce canton, les choses avancent plus facilement par le dialogue discret, par petits pas tenus loin des médias. Vous ne verrez donc pas, comme autrefois à Genève, une liste arc-en-ciel ou des revendications LGBT portées en étendard comme thème de campagne. Pourtant, les enjeux sont nombreux, et les soutiens existent dans toute la largeur de l’éventail politique.

Aujourd’hui, un seul député vaudois s’est déclaré ouvertement gay: il s’agit de Martial de Montmollin (Les Verts). «Si on avait même 5 % de représentant-e-s LGBT au parlement, c’est clair que ça aiderait la cause, mais on ne peut bien sûr pas forcer les gens à s’outer», explique Santa Di Pietro, de l’association Lilith. Mais la communauté a des alliés dans la plupart des partis. «L’ouverture existe d’abord à gauche, par exemple au PS et chez les Verts, analyse Mehdi Künzle, responsable des affaires politiques de VoGay. Le contact passe de mieux en mieux avec le PLR et le PDC, mais il est quasiment inexistant avec l’UDC et le Parti évangélique. Le PBD fait de gros efforts.»

Santé, sécurité et éducation
Pour le futur gouvernement, difficile d’agir sur le mariage pour tous, car il relève de compétences fédérales. Cependant, un climat cantonal favorable pourrait, par un jeu de bonnes relations, mettre la pression sur Berne. Par contre, les ministres ont clairement un rôle à jouer chacun dans leur domaine; les principaux concernés étant la santé, la sécurité, et l’éducation.

A priori, sur les sept sièges à pourvoir, un seul devrait changer de mains, c’est celui de la formation, de la jeunesse et de la culture (DFJC). Anne-Catherine Lyon (PS) ne se représente pas, et sa place est convoitée par les deux favoris, la socialiste Cesla Amarelle et l’UDC Jacques Nicolet. Le vainqueur aura entre les mains les écoles, et donc le dernier mot sur les actions de sensibilisation des élèves sur les questions LGBT. «Ce n’est pas tant une question de parti que de personnalité, parce qu’on trouve des UDC très ouverts, notamment sur le mariage pour tous», nuance Florent Jouinot, agent communautaire. Mais pour Santa Di Pietro, «en l’occurrence, M. Nicolet est quand même très très UDC, au sens de conservateur.»

Répertorier
Un chantier doit être attaqué en priorité par les futurs élus, selon les associations. C’est une évidence: sans chiffres, impossible de faire reconnaître les problèmes et de cibler correctement les solutions. Il faudrait donc améliorer la récolte des données. Les violences homophobes ne sont pour l’instant pas répertoriées, ni lors d’un dépôt de plainte, ni dans le cadre scolaire. «Du coup, il m’est déjà arrivé qu’un directeur d’établissement me dise qu’il n’y a pas de violences homophobes dans les écoles!», s’exclame Florent Jouinot. Les cas de mal-être liés à l’homosexualité et aux transitions sont également peu évalués, et l’on manque donc de statistiques. On sait aussi que le taux de chômage des personnes trans est catastrophique, mais impossible de le chiffrer sans données fiables.

Autre problème: si le partenariat enregistré est désormais bien implanté dans le canton, il n’est toujours pas inscrit dans la plupart des bases de données. «En 2018, c’est l’entrée en vigueur de l’adoption de l’enfant du conjoint, rappelle Mehdi Künzle. Pour l’instant, les formulaires scolaires font encore mention du papa et de la maman, alors qu’à Genève ils se sont déjà adaptés.» Toutefois, si cette donnée venait à être mieux enregistrée, elle devrait être bien protégée, puisque l’orientation sexuelle reste une question de vie privée.

Mieux former
De meilleures statistiques ne servent pas juste à faire joli. Pour les associations, ces chiffres permettraient de soutenir et de mieux cibler la prévention et la formation du personnel de l’Etat. Cette sensibilisation devrait être améliorée auprès de la police, du corps enseignant, mais aussi du monde de la santé. Une interpellation déposée en 2013 par Martial de Montmollin rappelait par exemple que les personnes admises au CHUV pour une transition sont enregistrées selon leur sexe et prénom officiel. De quoi créer des situations incongrues et inconfortables, qui peuvent devenir intenables lorsqu’elles se répètent dans les prisons, ou les centres pour réfugiés. Ces derniers sont également mis dans des situations absurdes, voire dangereuses, lorsqu’ils fuient un pays répressif pour pouvoir vivre pleinement leur orientation sexuelle; ils se retrouvent alors hébergés avec des ressortissants de leur pays d’origine, précisément ceux qu’ils cherchaient à fuir. Cette façon de procéder attend une volonté politique pour être rectifiée, selon les associations.

Malgré tout ce qu’il reste à faire, il y a également des bonnes nouvelles. Lors de sa session de printemps, le Parlement suisse a répété sa volonté d’élargir la norme pénale antiraciste aux discrimination homophobes. En clair, quelqu’un qui tient des propos incitant à la haine contre les personnes LGBT pourra être puni pénalement dès que la loi aura été écrite. Ce devrait être chose faite d’ici deux ans.

Difficile de s’y retrouver: ils sont près de 900 candidats à briguer les 150 sièges du Grand Conseil, et 15 pour les 7 fauteuils du Conseil d’Etat. Tous les partis ont donc reçu un questionnaire pour vous permettre de mieux cerner les personnalités. Les résultats seront publiés mi-avril sur le site vaud.lgbt. «On leur offre une porte ouverte vers l’électorat LGBT, mais en échange on attend qu’ils prennent leurs responsabilité. C’est une façon de leur mettre la pression», explique Mehdi Künzle. Mais, comme les années précédentes, beaucoup ne prendront tout simplement pas la peine de le remplir.

» http://vaud.lgbt

Un délégué pour uniformiser

On l’a vu, les enjeux sont nombreux, et surtout transversaux. Chaque département a du travail à faire, et ce n’est bien sûr pas simple à mettre en place chacun de son côté. La Ville de Genève a donc créé en 2012 un poste de délégué à la lutte contre les discriminations liées à l’orientation sexuelle ou à l’identité de genre. Un tel poste devrait exister prochainement à Lausanne, si la ville rejoint le réseau Rainbow Cities, une coalition de villes contre l’homophobie. Ce sont les Verts qui en ont fait la proposition en février, après que Berne et Zurich ont emboîté le pas à Genève. Dans le canton de Vaud, on ne peut donc s’empêcher de rêver: existera-t-il un jour un Délégué cantonal aux questions LGBT?

SOURCE : 360.ch

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