Présentation sur France Culture du livre de Philippe Pons et Pierre-François Souyri, L’esprit de plaisir: Une histoire de la sexualité et de l’érotisme au Japon (17e-20e siècle), Payot, 2020. A écouter ici.
Érotisme au Japon : raffinement et fascination
Nous plongeons ce matin dans l’époque d’Edo (1603-1867) durant laquelle l' »esprit de plaisir » s’épanouit au Japon, marqué par une sexualité débridée et des mœurs désinhibées. L’arrivée des Occidentaux à la fin du XIXe siècle corsètera le désir et bridera l’imaginaire érotique…
L’émission que voici va se situer à mi-chemin de la grivoiserie et de la pudibonderie. Vous comprendrez mieux cet incipit, qui vous intriguera peut-être, si je vous dis que nous allons parler de l’érotisme et de la sexualité au Japon.
L’occasion m’en est donnée par la parution du livre que deux auteurs reconnus viennent de consacrer à ce thème. Philippe Pons a été pendant de longues années le correspondant du Monde à Tokyo, d’où il envoie toujours des articles très appréciés. Pierre-François Souyri, qui est devant moi, a dirigé là-bas la Maison franco-japonaise et il est professeur émérite à l’université de Genève.
Il y a déjà belle lurette que l’historiographie la plus savante n’hésite pas – et elle fait bien – à aborder des domaines qui auraient paru extravagants à la Sorbonne d’autrefois. Nous allons, je l’espère, réussir à démontrer qu’à condition, bien sûr, de considérer le sujet selon les mutations qu’il a pu connaître dans la longue durée des siècles, celui-ci a beaucoup à nous dire sur les équilibres et les déséquilibres successifs d’une société, selon les époques, entre la tolérance et la répression, entre les pratiques et les rêves, entre le dissimulé et l’ostensible.
Nous le ferons, naturellement, depuis notre continent, et nous ne fuirons pas la comparaison entre ces deux mondes. D’abord puisque c’est ici que nous sommes et que l’histoire comparative est stimulante. Ensuite parce que l’influence des pays occidentaux, après qu’ils ont forcé l’ouverture de l’archipel, dans la décennie 1850, comme après l’effondrement de 1945, a été grande, à cet égard comme à d’autres. Mais sans qu’elle efface en profondeur l’originalité des comportements japonais dans le domaine du sexe et de l’amour. Concordances et différences vont ainsi être abordées, ce matin, de manière aussi spatiale que temporelle. En route donc, allègrement, vers ces rivages lointains.